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FAITS DE L’AFFAIRE, TEXTES DE LOI ET JURISPRUDENCE

Une bonne connaissance des faits de l’affaire est nécessaire pour bien jouer votre rôle. Les textes de loi et la jurisprudence seront importants surtout pour les avocats et le juge du procès.

PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

FAITS DE L’AFFAIRE

Les gens ne se présentent pas devant les tribunaux sans raison. La plupart du temps, ils y vont parce qu’une situation est devenue sans issue et qu’il faut une personne impartiale (le plus souvent, un juge) pour trancher le différend. Même si chaque partie tente de faire valoir sa position, chaque affaire compte un ensemble de faits « neutres » qui ne sont pas remis en question. Dans la présente affaire, ces faits sont les suivants :

Réalités divergentes
Marcel Martel est un programmeur de jeux vidéos qui possède plusieurs années d’expérience dans l’industrie. Ainsi, il a été à l’emploi de Lizzard, une des plus grandes entreprises de création de jeux vidéo, ainsi que de Gamepics, une société plus modeste. Dans le cadre de ces emplois, il a été appelé à travailler sur des jeux qui ont connu beaucoup de succès tels Galaxy Craft et Nitefort.
Malgré ces succès, M. Martel n’est pas toujours satisfait de la direction que prennent ces entreprises et il décide en 2018 de fonder sa propre entreprise se spécialisant dans la réalité virtuelle. Il utilise l’argent de la prime de départ qu’il a obtenue de Gamepics pour se procurer le matériel nécessaire au démarrage de l’entreprise.

Même si M. Martel possède beaucoup d’expérience en matière de programmation de jeux vidéos, il connait mal la technologie nécessaire pour réaliser un jeu de réalité virtuelle. Il fait donc appel à Suzie Soucis, une experte dans le domaine ayant déjà travaillé sur plusieurs jeux du genre et qu’il connaît depuis ses années à l’université puisqu’ils ont étudié ensemble. M. Martel dit à Mlle Soucis qu’il ne peut pas vraiment la payer, mais que si elle lui vient en aide pour créer son nouveau jeu (qui va s’appeler « Call of Honour 6: Nuclear City »), il s’engage à récompenser son travail à sa juste valeur. Mlle Soucis accepte cette offre sans autre formalité.

Il faudra deux ans pour concevoir et réaliser le jeu. Pendant cette période, M. Martel consacre tout son temps au jeu, alors que Mlle Soucis continue de travailler à temps plein pour son employeur actuel, mais passe plusieurs soirées et fins de semaine à la réalisation du logiciel de réalité virtuelle intégré au jeu. Pour financer les coûts liés à la réalisation du jeu et sa mise en marché (qui s’élèvent à plus de 750 000 $), M. Martel investit presque toutes ses économies.

Tous ces efforts finissent par aboutir puisque le jeu est un véritable succès avec des ventes totalisant plus de 6 millions $ au cours des deux semaines suivant son lancement. Le jeu générera un autre 4 millions $ pendant la première année et on estime qu’il va rapporter environ 8 millions $ par année au cours des trois prochaines années.
Fière de cette réussite, Suzie aborde Marcel pour lui parler de la compensation à laquelle elle a droit. Peu de temps après, M. Martel propose à Mlle Soucis une somme de 500 000 $ à titre de paiement, ainsi qu’un pourcentage de 5% sur les revenus futurs du jeu.

Suzie rejette cette offre et, après consultation avec un avocat, poursuit maintenant Marcel pour un montant de 3 millions $ (plus 30 % des revenus futurs) en argumentant qu’elle a droit à cette somme puisque le jeu est une « oeuvre créée en collaboration ».

Dans cette affaire, Mlle Soucis est le demandeur (CARTE 28) alors que M. Martel est le défendeur (CARTE 29). L’avocat de Mlle Soucis est l’avocat du demandeur (CARTE 26) alors que l’avocat de M. Martel est l’avocat du défendeur (CARTE 27).

TEXTES DE LOI

Les textes de loi contiennent le cadre général qui permet de décider de l’issue d’un procès. Les avocats porteront particulièrement attention à ces textes de loi pour y trouver des dispositions qui viennent appuyer leur position. Dans cette affaire, les textes de loi qui s’appliquent sont les suivants :

Article 2 et de la Loi sur le droit d’auteur
2 Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
( … )
oeuvre créée en collaboration 
Oeuvre exécutée par la collaboration de deux ou plusieurs auteurs, et dans laquelle la part créée par l’un n’est pas distincte de celle créée par l’autre ou les autres.
( … )

JURISPRUDENCE

Il faut parfois aussi considérer les décisions des tribunaux dans des affaires semblables, ce qu’on appelle la jurisprudence. Dans le cas présent, prenez connaissance de la jurisprudence suivante : dans l’affaire Seggie c. Roofdog Games Inc., la Cour supérieure du Québec est appelée à considérer la définition « d’oeuvre créée en collaboration » à l’article 2 de la Loi sur le droit d’auteur et résume l’état de la jurisprudence à ce sujet. Ainsi, les principes suivants s’appliquent pour décider s’il s’agit d’une oeuvre créée en collaboration :
– une œuvre conjointe est ainsi qualifiée à la lumière de la loi et des faits;
– l’apport des coauteurs n’a pas besoin d’être équivalent, mais l’apport de chacun doit être substantiel;
– une certaine collaboration doit s’établir entre les coauteurs dans la poursuite d’un dessein commun;
– il faut prouver plus que des idées et des suggestions;
– une certaine jurisprudence considère également pertinente l’intention commune des parties de créer ou non une œuvre en collaboration.